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Blog officiel de Bernard de La Villardière
8 avril 2010

Journaliste ou espion ?

Une récente émission de télévision, « Les Infiltrés » a ouvert un débat sur le rôle des journalistes et les limites qu’ils ne doivent pas franchir dans leur volonté d’informer.

Il est des pays et des sujets sur lesquels le journaliste doit user de subterfuges. A Cuba comme en Egypte récemment, les équipes d’Enquête Exclusive ont du tourner avec de petites caméras et sans visa professionnel. La liste des pays dans lesquels les reporters ne peuvent travailler librement s’allonge. En Russie, le moindre déplacement hors de la capitale doit être signalé aux autorités à Moscou. Idem en Chine. Il y a trois ans je n’ai pas eu la permission de me rendre à la frontière entre la Chine et la Corée du Nord.

En France, les fameuses « zone de non droit » sont devenues périlleuses pour les équipes de télévision et de radio rapidement repérées du fait de leur matériel. Je me souviens que lors d’une émeute à Sarcelles, ma voiture siglée RTL, avait été retournée et brulée. C’était il y a une quinzaine d’années. Les rédactions ont alors utilisé des voitures banalisées. Ce fut le début d’un jeu de cache-cache qui a parfois conduit à des dérapages.

Florence Aubenas vient de publier un récit de son séjour parmi les femmes de ménage dans l’hôtellerie. Elle a partagé leur sort au jour le jour en se faisant passer pour l’une d’entre elles. Je n’ai pas lu le livre et je ne doute pas qu’il soit poignant. Mais fallait-il absolument dissimuler sa qualité de journaliste pour approcher la réalité de ce milieu ? Je ne le crois pas et c’est la raison pour laquelle je pense que le livre de Florence Aubenas procède davantage d’un genre littéraire que d’une enquête journalistique.

En revanche, le journaliste de l’agence Capa qui a récemment infiltré les milieux pédophiles n’aurait pas obtenu les mêmes informations s’il avait sorti sa carte de presse. Les portes seraient restées fermées, les bouches muettes. Son travail a permis de sensibiliser le grand public. Devait-il dénoncer ses contacts ? Bien évidemment car la loi l’y oblige mais aussi parce que son geste a sauvé des enfants.

Mais l’usage de la caméra cachée doit rester l’exception. Récemment, un magazine de télévision a recouru au procédé pour obtenir des informations auprès d’un certain nombre d’institutions ayant pignon sur rue. Ces informations étaient pourtant accessibles sur le site Internet des institutions ainsi piégées. Le recours à la caméra cachée voulait donner un ton sulfureux à un sujet plutôt banal. Il n’était question ni de mafias, ni de sectes, ni de réseaux occultes se livrant à des activités illicites.

La bonne règle est qu’un journaliste ne doit tricher avec sa qualité professionnelle qu’une fois épuisés tous les moyens d’informer honnêtement, librement.

Bernard de La Villardière

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